Veille Hebdo Covid - Couvre-feu, variant et vaccination, la situation sanitaire dans le monde
- institutcrises
- 5 janv. 2021
- 7 min de lecture
Par Chiara ALEXANDRE
Directeur de publication : Thomas MESZAROS
Responsable pédagogique : Fabien DESPINASSE
Le 31 décembre 2020, cela fait un an que l’on a découvert le SARS-CoV-2 à Wuhan, en Chine. Nombre d'experts pensaient au départ que cela se limiterait au Sud-Est asiatique, comme le précédent SRAS. Depuis, la pandémie s’est étendue au monde entier, causant plus de 1,8 million de morts [1]. Entre espoir de la vaccination et craintes de potentielles mutations, il est encore difficile de présager l’année à venir.

Source : Santé publique France / Copyright : Santé publique France / Utilisation non commerciale
Lien de l’infographie : COVID-19 : point épidémiologique du 31 décembre 2020
I. La situation sanitaire mondiale
Après les fêtes de fin d’année, de nombreux pays craignent un nouveau rebond épidémique. L’inquiétude se porte notamment sur le variant du SARS CoV-2 observé au Royaume-Uni. Cette nouvelle souche est considérée par les autorités sanitaires comme étant plus contagieuse de 50 à 74% que les autres mutations du Covid [2]. Des épidémiologistes du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies [3] ont en effet confirmé que « les modélisations préliminaires montrent une forte association entre la présence de ce nouveau variant dans le Kent, les régions du sud-est de l’Angleterre et l’incidence en hausse de Covid-19 ». Le centre estime que ce variant présente « un risque élevé » s’il se diffuse sur l’ensemble du continent et sa plus grande contagiosité aura un impact estimé « plus élevé sur le nombre d’hospitalisation et le nombre de morts » [4].
Le 4 janvier 2020, en raison de l’accélération de l’épidémie malgré la mise en place de la campagne de vaccination, un nouveau confinement total a été annoncé en Angleterre et en Ecosse jusqu’à la mi-février. Comme lors du premier confinement au printemps et contrairement au deuxième en novembre, les écoles seront fermées et passeront à l’enseignement à distance.
Au Danemark, 86 cas du nouveau variant ont été enregistrés. Selon l’Agence danoise de contrôle des maladies infectieuses « la propagation d’une variante du virus plus contagieuse peut conduire à une courbe épidémique plus abrupte (…), ce qui signifiera que nous devrons renforcer nos mesures de prévention des infections ou les maintenir plus longtemps pour maintenir l’épidémie sous contrôle ». Ce variant a également été enregistré en Turquie, en France, en Suède, en Suisse, au Portugal ou encore aux États-Unis.
Ainsi, de nouvelles restrictions sont prises dans différents pays. En Grèce, une nouvelle prolongation du confinement strict a été annoncé jusqu’au 10 janvier pour des raisons préventives. L’Italie a quant à elle repoussé l’ouverture de ses stations de ski au 18 janvier, estimant que les conditions n’étaient pas réunies pour une ouverture initialement prévue le 7 janvier. En Allemagne, les restrictions en vigueur, dont la fermeture des écoles, commerces « non essentiels », bars et restaurant, devraient être prolongées au-delà du 10 janvier 2021. Le 31 décembre 2020, le pays a connu plus de 1 000 décès et près de 22 500 nouvelles infections.
L’Irlande a également annoncé durcir pour au moins un mois le confinement partiel instauré la semaine dernière. Le taux d’infection augmente « exponentiellement » et les écoles verront leur rentrée retardée de trois jours.
II. De nouvelles mesures préventives en France
En France, un couvre-feu destiné à lutter contre l’épidémie était en place le soir du réveillon de la nouvelle année. Un important dispositif policier était déployé afin d’éviter les fêtes clandestines et les rassemblements non autorisés « qui présentent un risque particulièrement élevé pour la santé publique ». Cependant, à Lieuron, au sud de Rennes, une rave-party sauvage s’est tenue de jeudi soir à samedi matin, plus de 1 600 verbalisations ont été effectuées.
L’agence régionale de santé de Bretagne rappelle que ce rassemblement « présente un très fort risque de diffusion du Covid-19 » alors que la courbe épidémique ne flanche pas. Vendredi 1er janvier, le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a ainsi annoncé que les établissements culturels ne rouvriront pas au 7 janvier en raison de la circulation du virus en France. L’exécutif n’entend pas fixer tout de suite de nouvelle date de réouverture car « il faut d’abord voir quels sont les effets des fêtes de fin d’année sur l’épidémie, si le nombre de cas s’envole de nouveau ou pas. Rien ne devrait être annoncé avant la mi-janvier, au mieux ». Le gouvernement va continuer à soutenir financièrement le secteur de la culture et des négociations devraient s’ouvrir sur le prolongement des mesures de chômage partiel accordées aux entreprises culturelles jusqu’au 31 janvier.
Le 2 janvier 2021, six millions de Français sont concernés par le couvre-feu anticipé mis en place pour tenter de limiter une potentielle troisième vague. Le couvre-feu a ainsi été avancé à 18 heures dans 15 départements alors que les autorités craignent une nouvelle « flambée épidémique ». Selon Santé publique France [5], « le nombre de tests a continué d’augmenter » et plus de 10 000 nouvelles contaminations sont rapportées chaque jour. Les départements concernés par le couvre-feu anticipé sont ceux dans lesquels le « taux d’incidence du virus dans la population générale et chez les personnes âgées nettement supérieurs [à ceux du] reste de la France ». Bien que l’efficacité de cette mesure ne convainc pas tout le monde, Santé publique France affirme que les couvre-feux imposés localement en octobre avaient permis de ralentir l’épidémie. Cependant, la mesure choisie par le gouvernement est jugée trop légère par des responsables locaux, notamment dans l’Est. La demande de mesures locales « sur-mesure » comme le réclamait certains élus, a toutefois été entendue par le gouvernement. Il semblerait qu’il s’agisse d’un premier pas vers une gestion décentralisée de la crise sanitaire comme attendue depuis l’été 2020.
III. Les campagnes de vaccination
Plus de 5 millions de doses de vaccin contre le Covid ont déjà été administrés à travers le monde. En Israël, le 27 décembre, le Premier ministre a déclaré que d’ici « un mois, 2,5 millions de personnes auront été vaccinées ». Le pays qui a déjà connu trois confinements fait partie des plus avancé au monde en matière de vaccination : 643 600 personnes, soit 7,4% de la population, ont été vaccinées en neuf jours. Afin d’être servi prioritairement, le pays a acheté les doses de vaccins 43% plus cher que le prix du marché.
Depuis le 27 décembre, l’Allemagne a vacciné près de 80 000 personnes. Le pays a installé plus de 400 centres de vaccination dans des aéroports ou dans des centres d’exposition et des salles de concerts. Malgré tout, le gouvernement est critiqué pour sa lenteur et la population se plaint de problèmes logistiques et de retards de livraison. Le Ministre de la santé a toutefois assuré que « tous les Allemands souhaitant se faire vacciner pourront le faire d’ici l’été ».
Aux États-Unis, 2,6 millions de doses ont été administrées entre le 14 et le 30 décembre grâce à l’opération « Warp Speed » [6]. L’objectif de 20 millions de personnes vaccinées avant la fin de l’année annoncé par Donald Trump n’a pas été atteint mais cela représente tout de même la moitié des doses administrées dans le monde.
Au Royaume-Uni, plus de 800 000 doses ont été injectée depuis le 8 décembre. De plus, le gouvernement britannique veut amplifier sa campagne de vaccination. Ainsi, le 30 décembre 2020, la Medicines and Healthcare products Regulatory Agency a annoncé avoir donné son feu vert à l’utilisation du vaccin développé par l’Université d’Oxford et la firme pharmaceutique AstraZeneca. Le gouvernement a commandé 100 millions de doses au total et devrait disposer dès la semaine prochaine « de centaines de milliers de doses ». Il s’agit d’un « moment extrêmement important dans la lutte contre la pandémie » dans une période où la situation reste « extrêmement préoccupante » dans le pays. Matt Hancock, le ministre de la santé a ainsi prévenu que « la nouvelle souche du virus a rendu notre stratégie de suppression du virus encore plus compliquée ». Ainsi, bien que la campagne de vaccination soit efficace, de nouvelles mesures de confinement restent très probables pour les semaines à venir.
L’Union Européenne, elle, n’envisage pourtant pas donner son feu vert pour l’utilisation du vaccin d’AstraZeneca avant fin janvier 2021, « faute de données suffisantes ». En effet, le mercredi 30 décembre, un communiqué de l’Agence Européenne du Médicament affirme que « des informations scientifiques supplémentaires sur les questions liées à la qualité, à la sécurité et à l’efficacité du vaccin sont jugées nécessaires pour renforcer la rigueur requise pour une autorisation de mise sur le marché conditionnelle, et cela a été demandé à l’entreprise ».
En France, la stratégie vaccinale soulève de nombreuses questions. Avec 138 personnes vaccinées au 30 décembre, il semble que la campagne de vaccination soit bien plus lente que celle des pays voisins. Olivier Véran a ainsi expliqué que cet écart est « assumé », rappelant que « ce qui compte, c’est que d’ici à la fin du mois de janvier, nous ayons rattrapé le décalage vis-à-vis de tout le monde ». Le Président du conseil d’orientation de la stratégie vaccinale française, Alain Fisher explique quant à lui que cette lenteur « donne le temps de faire les choses bien en termes de sécurité, d’efficacité, d’organisation et d’éthique avec le consentement ». En effet, la France est le seul pays à recueillir le consentement des personnes avant la vaccination. La défiance des français à l’égard des vaccins, des scientifiques et des politiques gouvernementales, mise en avant régulièrement pas des sondages Ipsos [7], est donc au cœur de cette stratégie mais cela pose de nombreux problèmes logistiques et ralentit les processus.
Olivier Véran, a également fourni un nouvel élément du calendrier vaccinal, en annonçant la mise à disposition du vaccin pour les soignants de plus de 50 ans.
Alors que le ministre de la santé italien évoque la possibilité de rendre la vaccination contre le Covid obligatoire, la même question est soulevée en France. En effet, les deux pays connaissent une forte défiance de leur population. Pour la France à ce jour, il est toutefois possible de considérer que l’obligation de vaccination reste une stratégie risquée écartée par le gouvernement.
[1] Futura Sciences, « Un an de coronavirus : les grandes dates de la pandémie de Covid-19 », le 28 décembre 2020, (en ligne). Disponible sur : https://www.futura-sciences.com/sante/actualites/coronavirus-an-coronavirus-grandes-dates-pandemie-covid-19-84897/
[2] Centre for mathematical modelling of infectious diseases, . « Estimated transmissibility and severity of novel SARS-CoV-2 Variant of concern 202012/01 in England », le 31 décembre 2020, (en ligne). Disponible sur : https://cmmid.github.io/topics/covid19/uk-novel-variant.html
[3] European centre for Disease Prevention and Control, « Rapid increase of a SARS-CoV-2 variant with multiple spike protein mutations observed in the United Kingdom », 20 décembre 2020, (en ligne). Disponible sur : https://www.ecdc.europa.eu/sites/default/files/documents/SARS-CoV-2-variant-multiple-spike-protein-mutations-United-Kingdom.pdf
[4] European centre for Disease Prevention and Control, « Risk Assessment: Risk related to spread of new SARS-CoV-2 variants of concern in the EU/EEA », le 29 décembre 2020, (en ligne). Disponible sur : https://www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/covid-19-risk-assessment-spread-new-sars-cov-2-variants-eueea
[5] Santé publique France, « COVID-19 : point épidémiologique du 31 décembre 2020 », (en ligne). Disponible sur : https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respiratoires/infection-a-coronavirus/documents/bulletin-national/covid-19-point-epidemiologique-du-31-decembre-2020
[6] Pour plus d’informations : HHS.gov, « Fact Sheet : Explaining Operation Warps Speed », le 21 décembre 2020, (en ligne). Disponible sur : https://www.hhs.gov/coronavirus/explaining-operation-warp-speed/index.html
[7] Ipsos, Sciences « Baromètre Science et Société : les scientifiques de moins moins épargnés par la défiance des Français », le 3 décembre 2020, (en ligne). Disponible sur : https://www.ipsos.com/fr-fr/barometre-science-et-societe-les-scientifiques-de-moins-en-moins-epargnes-par-la-defiance-des
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